Grèce : accord aux forceps au bout d’interminables négociations
Le Premier ministre grecque Alexis Tsipras et le président français François Hollande .
Au terme de 17 heures de négociations marathon, les chefs d’Etat de la zone euro sont parvenus à un accord sur un éventuel troisième plan d’aide international à la Grèce, assorti de conditions draconiennes.
Entre la Grèce et la zone euro, si un accord est bel et bien sur la table celui-ci a des allures d’échéancier et le chemin s’annonce encore long avant la rédemption hellène. « Vu le besoin de rétablir la confiance », considérée comme rompue par le gouvernement de gauche radicale d’Alexis Tsipras, la Grèce doit « légiférer sans délai« . D’ici mercredi, elle doit « rationaliser le système de TVA et élargir sa base pour augmenter ses revenus », « améliorer la soutenabilité de son système de retraites », « assurer l’indépendance de l’institut statistique ELSTAT », et « mettre en place une Autorité fiscale indépendante ainsi qu’un mécanisme de réduction automatique des dépenses en cas de ratage des objectifs budgétaires ».
En sus, d’ici au 22 juillet, la Grèce doit « adopter un code de procédure civile » et transposer en droit grec une directive sur le renflouement des banques. L’accord proposé ce lundi liste sans ambiguïté les mesures impératives exigées par Bruxelles avant de commencer à discuter d’un nouveau plan d’aide.
Des réformes en cascade. Outre ces préalables, le gouvernement grec doit « sérieusement renforcer ses propositions de réformes » s’il veut obtenir un accord. Les créanciers exigent notamment « un ambitieux programme de réformes des retraites », « des reformes plus importantes du marché intérieur », notamment dans le domaine des soldes, des pharmacies, des boulangeries, de l’ouverture des commerces le dimanche… En d’autres termes une super loi Macron à la façon grecque.
La Grèce devra « moderniser (…) l’administration grecque » et notamment la « dépolitiser » à travers un programme spécifique. La Grèce doit présenter ses projets sur ce point d’ici lundi prochain. Le texte stipule que la Grèce devra revoir certaines des mesures adoptées depuis janvier par le gouvernement d’Alexis Tsipras, sans plus de précision à ce stade. Dans la ligne de mire de Bruxelles, des « contraires aux engagements » des précédents gouvernements grecs.
Les créanciers exigent en outre une « modernisation » et un « examen rigoureux » du marché du travail, dans un pays où plus d’un jeune sur deux est au chômage, afin d‘ »aligner les politiques de l’emploi sur les standards internationaux et européens ».
50 milliards d’euros de privatisations. La première des privatisations exigées par les créanciers de la Grèce concerne le réseau de transport électrique (ADMIE). En dehors de cette directive, Bruxelles demande à Alexis Tsipras que soit mis en oeuvre « un programme de privatisation plus développé » que celui qui figurait jeudi dans les propositions grecques. Pour s’assurer de l’application de ce programme, ils exigent la création d’un fonds ad hoc qui a fait cette nuit l’objet d’âpres négociations.
« Les actifs grecs de valeur seront transférés à un Fonds indépendant qui les monétisera par des privatisations ou d’autres moyens », prévoit notamment l’accord. Ce Fonds devra générer 50 milliards d’euros, dont 50% serviront à recapitaliser les banques grecques au bord de l’asphyxie financière. Le solde sera, selon les souhaits des créanciers, équitablement affecté au désendettement (12,5 milliards) et à un plan de relance sous forme d’investissements publics (12,5 milliards).
Contrairement à ce que souhaitaient initialement les négociateurs européens, ce Fonds devrait être basé non pas au Luxembourg, mais en Grèce. Il sera géré par les autorités grecques sous l’étroite « supervision » des autorités européennes.
Un troisième plan d’aide de plus de 80 milliards? Si Athènes se conformait aux exigences de ses créanciers, l’ensemble d’un troisième programme d’aide à la République hellène pourrait représenter de 82 à 86 milliards d’euros. Les Institutions sont invitées à voir comment elles pourraient réduire l’enveloppe des financements. Notamment en assouplissant les conditions de remboursement de la dette grecque. « L’Eurogroupe est prêt à évaluer, si nécessaire, des mesures additionnelles (allongement des délais de grâce et des maturités) », seulement si la Grèce a respecté ses engagements.
En attendant, les chefs d’Etat et de gouvernement de la zone euro demandent à l’Eurogroupe de trouver « une solution transitoire » pour permettre à la Grèce de faire face à ses besoins urgents de financements (12 milliards d’euros d’ici mi-août) et pour lui permettre de payer ce qu’elle doit, notamment au FMI depuis la fin du mois de juin. Le FMI que Tsipras aurait aimé voir exclu d’un nouveau plan d’aide continuera d’être associé au programme grec, y compris au delà de l’échéance de mars 2016, date à laquelle il devait s’achever.
Télécharger ici la Déclaration du sommet de la zone euro