Hissène Habré amené de force au premier jour de son procès
Hissène Habré lundi lors du premier jour de son procès à Dakar. (Photo AFP).
Jugé devant un tribunal spécial à Dakar pour «crimes contre l’humanité, crimes de guerre et crimes de torture»…, l’ex-président tchadien Hissène Habré a troublé l’audience lors du premier jour de son procès.
L’ex-président tchadien Hissène Habré a été amené de force ce lundi, 20 juillet, au tribunal spécial devant le juger pour «crimes contre l’humanité, crimes de guerre et crimes de torture».
Hissène Habré, 72 ans, vêtu de blanc et coiffé d’un turban, a été porté dans le box des accusés des Chambres africaines extraordinaires (CAE), au palais de justice de Dakar, par des agents de l’administration pénitentiaire. Il a levé le poing et crié «Allah akbar» («Dieu est grand»). « A bas l’impérialisme. A bas le nouveau colonialisme », a-t-il crié contre cette institution judiciaire ad hoc créée à la demande l’Union africaine et installée au Sénégal où il vivait un exil paisible depuis sa chute en 1990.
Maîtrisé par plusieurs colosses, porté manu militari dans son box, Hissène Habré a de nouveau hurlé contre « les bandits, les vassaux des Américains » qui, selon lui, l’ont conduit là. Dans la salle, une poignée de ses partisans lui criaient leur fidélité. Jusqu’à ce que les gendarmes expulsent les perturbateurs et l’accusé conduit dans l’arrière-box, en dehors de la salle. De l’autre côté de la salle, les parties civiles – avocats, victimes du régime Habré ou associations représentants les milliers de disparus, exécutés sommairement ou morts en prison dans des conditions atroces – assistaient passivement à l’esclandre, drapées dans une profonde dignité.
A gauche, les bancs de la défense sont restés vides. Cette stratégie est dictée par l’ex-président tchadien qui ne reconnaît pas l’autorité des Chambres africaines extraordinaires. Ses avocats, Mes François Serres et Ibrahima Diawara, ne franchiront pas les portes de la salle d’audience. Ils dénoncent «une violation flagrante des droits de la défense». «Le président Habré a été extrait militairement et brutalement de sa cellule ce matin par les éléments de la gendarmerie et emmené de force pour comparaître», explique Me François Serres, avocat au barreau de Paris, posté dans la cour du Palais de Justice.
Le vieil homme refuse de comparaître. Il ne pourra pas s’opposer physiquement à la force des gendarmes le portant dans son box. Mais il a déjà provoqué une suspension de trois heures qui s’étirée tout l’après-midi, jusqu’au lendemain matin, le temps que la cour demande à un huissier de lui notifier l’obligation de sa présence. Ce qui n’exclut pas un nouveau coup de gueule une fois dans la salle. Et surtout, il a demandé à ses avocats de ne pas le défendre. De ne même pas venir dans la salle d’audience. La prochaine étape, pour le président du tribunal, le Burkinabé Gberdao Gustave Kam, serait alors de nommer des avocats commis d’office. Quant à l’éventualité de voir sa défense assurée par des avocats commis d’office, sa réponse est sans équivoque : «Ce sont des traîtres».