Hollande veut doter la Zone Euro d’un budget et d’un parlement
A. Merkel et Fr. Hollande lors du sommet du 12/13 juillet sur la Grèce – crédit : CUE
Dans la foulée de l’accord franco-allemand sur la Grèce, François Hollande veut pousser l’avantage en reprenant l’initiative sur la gouvernance de la Zone euro.
Dans une ‘lettre à Jacques Delors’, publiée par le journal du Dimanche (JDD), ce dimanche (19 juillet), le président français, François Hollande, appelle à approfondir la Zone Euro. « Ce qui nous menace, ce n’est pas l’excès d’Europe mais son insuffisance» explique le président français. Il propose une avant-garde, de doter la Zone Euro d’un budget et d’un parlement. Une nécessité, selon lui, pour l’Europe au plan intérieur comme au plan extérieur. « Partager une monnaie, c’est bien plus que vouloir une convergence. C’est un choix que 19 pays ont fait parce que c’était leur intérêt. Nul gouvernement d’ailleurs depuis quinze ans n’a pris la responsabilité d’en sortir. Ce choix appelle une organisation renforcée et avec les pays qui en décideront, une avant-garde. La France y est prête ».
Accélérer le tempo, approfondir l’Europe. L’élargissement de l’Europe ne pouvait se faire sans avoir « un approfondissement avec des intégrations différenciées », disait Jacques Delors. Cet approfondissement n’a pas vraiment été opéré depuis que l’Europe est passée de 15 à 28. « Avec Jacques Delors, l’Europe s’est élargie, mais il nous avait mis en garde en proposant un approfondissement avec des intégrations différenciées. Écoutons-le. Les circonstances nous conduisent à accélérer. La zone euro a su cette semaine réaffirmer sa cohésion avec la Grèce. »
Un budget et un parlement pour la Zone Euro. « La qualité de la relation franco-allemande y a été pour beaucoup. L’esprit européen a prévalu. Mais nous ne pouvons en rester là. J’ai proposé de reprendre l’idée de Jacques Delors du gouvernement de la zone euro et d’y ajouter un budget spécifique ainsi qu’un Parlement pour en assurer le contrôle démocratique. »
A l’intérieur, une dynamique de conviction des peuples. Cet approfondissement de la Zone Euro obéit à une nécessité intérieure. L’affaire grecque montre qu’on est au bout d’un dispositif qui a montré ses preuves durant des années (la gouvernance européenne par une élite avancée) mais doit arriver à se transformer aujourd’hui pour convaincre les peuples ». « L’Union ne peut se réduire à des règles, des mécanismes ou des disciplines. Elle doit convaincre les peuples que, si elle a été capable de préserver la paix, elle est aujourd’hui la meilleure invention pour protéger les valeurs et les principes qui fondent notre culture commune, ce que l’on appelle notre mode de vie et qui est aussi notre modèle social. »
L’Europe attendue au plan extérieur. Cette réponse européenne est nécessaire car l’Europe est attendue à l’extérieur. Et elle doit se transformer en une puissance capable d’agir. « Face à la globalisation et aux puissances émergentes, comme devant les risques liés aux instabilités à nos frontières, aux coups de force, aux guerres, au terrorisme, aux catastrophes climatiques et à ce qu’ils engendrent avec les déplacements de population (…) L’Europe est attendue pour porter les technologies de demain, promouvoir un modèle industriel, réussir la transition énergétique et écologique, investir dans la connaissance, réduire les disparités territoriales, assurer la solidarité à l’intérieur par des investissements et à l’extérieur par des actions de développement. Bref, être capable d’être une puissance au service de l’équilibre du monde. »
Commentaire : on retrouve ainsi les fondamentaux français d’une Europe « puissance », avec un gouvernement économique de la Zone Euro. Mais à part quelques grandes idées, rien de très précis. Or, un gouvernement de la Zone Euro, avec un budget et un parlement, c’est un système pré-fédéral, qui peut entrer en conflit, avec la volonté de plusieurs pays de garder la haute main sur toutes les affaires importantes. On peut voir ainsi se dessiner — s’il est réalisé — une confrontation à l’échelle européenne, entre certains pays – comme le Royaume-Uni – qui veulent négocier un allègement de leurs obligations et d’autres qui veulent renforcer le coeur de l’Europe. Cette confrontation sera-t-elle le prélude à un grand ‘deal’ européen (un peu moins d’Europe pour les uns, un peu plus pour les autres) ?
Source Bruxelles 2