Macron nomme son gouvernement: recomposition, parité et ouverture
M. Macron a temporisé, annonçant la composition avec une journée de retard, afin que la situation fiscale de chacun et l’absence de conflits d’intérêt soient rigoureusement contrôlés.
Emmanuel Macron a composé mercredi son premier gouvernement, une équipe de 22 membres, 18 ministres et quatre secrétaires d’Etat dont la moitié provient de la société civile, relativement resserrée et à l’image de la recomposition promise avec des ministres issus de la droite, comme de la gauche et du centre.
Le secrétaire général de l’Elysée Alexis Kohler en a annoncé la composition à 15H00 précises, selon l’horaire prévu, sur le perron de l’Elysée et selon les canons du genre. Les attributions précises des membres du gouvernement, dont la moyenne d’âge est de 54 ans, devraient être fixées par décrets « dans les 48 heures après le premier Conseil des ministres » qui se tiendra jeudi à 11H00, selon l’Elysée.
« L’engagement d’un gouvernement très resserré est totalement tenu » avec « une recomposition sans précédent » de l’exécutif, souligne-t-on dans l’entourage d’Emmanuel Macron qui précise qu’au lendemain des législatives des 11 et 18 juin, « il n’est pas impossible qu’on ait un petit réajustement ».
La parité est également parfaitement respectée, avec onze femmes et onze hommes et autant de ministres de plein exercice de l’un comme de l’autre sexe. « Emmanuel Macron voulait que les femmes occupent des ministères de premier plan et ne soient pas reléguées à des portefeuilles qui leur sont traditionnellement dévolus ou moins importants », fait-on également remarquer dans l’entourage du nouveau président.
Les quatre ministères régaliens ont été dévolus à deux socialistes – Jean-Yves Le Drian, l’un des deux rescapés du quinquennat de François Hollande, qui passe de la Défense à l’Europe et aux Affaires étrangère, et Gérard Collomb, « marcheur » de la première heure, qui prend l’Intérieur – et à deux centristes – François Bayrou à la Justice, et Sylvie Goulard aux Armées.
Nicolas Hulot occupe une place de choix dans l’organigramme. Deuxième des ministres dans l’ordre protocolaire, il entre pour la première fois dans un gouvernement après avoir été candidat malheureux à la primaire des Verts pour la présidentielle de 2012. L’ancien animateur d’Ushuaïa avait déjà été pressenti pour rejoindre un gouvernement Hollande en janvier 2016 après avoir été l’un des artisans de la COP21.
S’il est resserré, ce premier gouvernement de l’ère Macron compte cependant davantage de ministres que le premier gouvernement Fillon qui avait battu un record sous la Ve République en la matière avec seulement 15 ministres, quatre secrétaires d’Etat et un Haut-Commissaire.
Parmi les ministres figurent quatre socialistes (dont deux avaient rejoint En Marche!) deux radicaux de gauche, trois centristes, deux LR, les autres provenant de la société civile.
Dynamitage Avec Bruno Le Maire à l’Economie et Gérald Darmanin à l’Action et aux Comptes publics, Emmanuel Macron débauche dans les rangs des Républicains et donne Bercy à la droite, toujours plus fractionnée. « A titre personnel », François Baroin, chef de file des Républicains pour les législatives, a regretté ces ralliements, estimant qu’il ne s’agissait pas d’une « recomposition » mais d’un « dynamitage » politique.
Le secrétaire général du parti Les Républicains, Bernard Accoyer, a ensuite précisé par communiqué que les « membres de LR » qui ont « rejoint » le gouvernement « ne font plus partie des Républicains ». « Ils font le choix personnel de faire campagne avec le Premier Ministre en faveur des candidats d’En Marche contre nos candidats LR-UDI ».
Les nombreux socialistes entrés dans ce nouveau gouvernement achèvent aussi d’affaiblir le PS. « Cautions de gauche mais Matignon et Bercy à droite », a tweeté le premier secrétaire du parti Jean-Christophe Cambadélis dans une première réaction.
Outre Jean-Yves Le Drian, Annick Girardin est donc la seconde rescapée de l’ère Hollande, nommée aux Outre-Mer.
Désireux d’éviter un couac majeur, M. Macron a temporisé, annonçant la composition avec une journée de retard, afin que la situation fiscale de chacun et l’absence de conflits d’intérêt soient rigoureusement contrôlés.
Le souvenir de Thomas Thévenoud, l’éphémère secrétaire d’Etat qui avait oublié de déclarer ses revenus au fisc, est encore dans tous les esprits.
La première étape de la formation du nouvel exécutif avait été franchie lundi avec la nomination d’un Premier ministre venu du parti Les Républicains, Edouard Philippe, qui avait eu pour effet de semer un peu plus la zizanie à droite. Depuis lundi, 120 élus de la droite et du centre ont signé un appel à « répondre à la main tendue » par le nouveau président. « Une gifle » pour les candidats LR, selon le député Eric Ciotti.
Parmi les signataires de l’appel, des figures de la droite modérée comme Thierry Solère, Benoist Apparu ou Nathalie Kosciusko-Morizet, ainsi que le centriste Jean-Louis Borloo, dont aucun ne figure toutefois dans le premier gouvernement Philippe.
En riposte, sous l’égide de François Baroin, Les Républicains ont lancé un contre-appel des 577 candidats de la droite et du centre aux législatives à défendre leurs « convictions » et à gagner ces élections pour imposer une cohabitation.