Emmanuel Macron : « La France continuera à être engagée au Mali »
A la descente du Falcon présidentiel, Emmanuel Macron est accueilli par son homologue malien Ibrahim Boubacar Keïta.
Le président français a appelé à accélérer le processus de paix, tout en maintenant l’engagement militaire contre les djihadistes du Sahel.
Pour son premier déplacement hors d’Europe, le président français Emmanuel Macron a appelé vendredi 19 mai au Mali devant son homologue Ibrahim Boubacar Keïta à accélérer le processus de paix sur la base militaire française de Gao, principale ville du nord du pays. Moins d’une semaine après son entrée en fonction, le chef de l’État a marqué sa « détermination » à poursuivre l’engagement au Sahel en renforçant la coopération avec l’Allemagne, mais aussi en complétant l’action militaire par une stratégie de développement. À son arrivée dans la matinée, Emmanuel Macron, en costume bleu nuit, a été accueilli à la descente du Falcon présidentiel par Ibrahim Keïta, en boubou blanc, venu de la capitale Bamako.
Ils ont passé en revue les troupes présentes sur la base de l’opération française Barkhane, qui mobilise 4 000 soldats dans 5 pays (Mali, Burkina Faso, Mauritanie, Niger et Tchad), dont 1 700 en poste à Gao actuellement, dans la lutte contre les djihadistes au Sahel. Le président français, accompagné de ses ministres Jean-Yves Le Drian (Europe et Affaires étrangères) et Sylvie Goulard (Armées), ainsi que par le directeur général de l’Agence française de développement (AFD) Rémy Rioux, doit passer environ six heures sur place, suivant un programme très chargé.
Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes djihadistes liés à Al-Qaïda, qui ont été en grande partie chassés par l’opération Serval, lancée en janvier 2013 à l’initiative de la France, dont Barkhane a pris le relais en août 2014. Mais des zones entières échappent encore au contrôle des forces maliennes, françaises et de l’ONU (Minusma), régulièrement visées par des attentats meurtriers, malgré la signature en mai-juin 2015 d’un accord de paix censé isoler définitivement les djihadistes. Depuis 2015, ces attaques se sont étendues au centre et au sud du pays.
« Faisons-le sans barguigner » Deux ans après cet accord, la communauté internationale exprime régulièrement son impatience face aux retards accumulés dans son application, y compris envers le gouvernement malien. « Mon souhait, c’est que nous accélérions », a déclaré Emmanuel Macron au cours d’une conférence de presse conjointe avec Ibrahim Keïta après un entretien avec celui-ci. « On sait où sont les difficultés principales et ce que nous devons faire. Faisons-le sans barguigner », a-t-il lancé. Le chef de l’État français s’est également dit prêt à se rendre, à l’invitation de son hôte malien, à une réunion « dans les semaines qui viennent » du G5 Sahel, qui regroupe les pays de la zone.
Le G5 Sahel a adopté un plan prévoyant la création d’une force conjointe composée de 5 000 militaires, policiers et civils, pour combattre les groupes djihadistes et sécuriser les frontières communes des pays membres. Emmanuel Macron a également prôné une participation accrue des autres pays européens à la lutte contre les djihadistes, en particulier de l’Allemagne, premier contributeur européen à la Minusma. « Je souhaite que l’engagement allemand puisse s’intensifier, je l’ai évoqué lundi avec [la chancelière] Angela Merkel, c’est aussi sa volonté », a-t-il précisé. Il a dit s’inscrire dans la continuité de son prédécesseur François Hollande dans sa détermination à combattre militairement les groupes djihadistes au Sahel, mais vouloir aussi apporter un « grand volontarisme en matière de développement ».
Une approche contestée Au compte de l’AFD, « un peu plus de 470 millions d’euros [d’aide] ont été décidés sur la zone pour les années à venir, pour accompagner cet effort militaire », a annoncé Emmanuel Macron, voyant dans cet effort pour « permettre à la population de mieux vivre […] le meilleur antidote au développement du terrorisme islamiste ». Il a ensuite effectué un vol en hélicoptère au-dessus de Gao et de la boucle du fleuve Niger, à basse altitude, sous les caméras des télévisions embarquées à bord d’un autre hélicoptère. Alors que 25 journalistes sont du déplacement, une quinzaine de sociétés de journalistes, des directeurs de rédaction et Reporters sans frontières ont protesté jeudi contre l’organisation de sa communication, notamment le choix des journalistes l’accompagnant au Mali.
Avant même cette visite, plusieurs organisations humanitaires ont appelé Paris à renoncer à la seule approche militaire pour résoudre les violences secouant le Mali. La politique française en Afrique est trop « purement militaire », plaide la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH). Même diagnostic pour l’ONG Human Rights Watch, qui a conseillé à Emmanuel Macron d’« exhorter le président du Mali à s’attaquer frontalement aux problèmes qui ont mené à des décennies d’instabilité, notamment une faible gouvernance, une corruption endémique et les abus commis par les forces de l’ordre ». Dix-sept militaires français ont été tués au Mali depuis le lancement de Serval, en 2013, selon un décompte de l’Agence France-Presse.
Source AFP