Le basket perd une icône en Afrique
Mme Salamatou Maïga, manager de l’équipe nationale de basket aux Jeux de la Francophonie de Nice 2013.
Membre du Bureau central de FIBA-Afrique et aussi de la FIBA, joueuse du Djoliba AC et ancienne internationale Malienne de 1960 à 1980, Mme Salamatou Maïga s’est éteinte ce mardi 23 décembre 2014 à Paris (France) à 62 ans. Quelques jours après Fantani Touré, la mort nous prend une autre grande patriote dans la capitale française. Zoom sur cette icône qui a marqué le basket de son talent.
«Le sport, singulièrement le basket, perd une Grande Dame, une experte engagée et disponible» ! C’est ainsi qu’a réagi le président du Comité national olympique et sportif du Mali (CNOSM), Habib Sissoko, en apprenant la triste nouvelle du décès de Mme Salamatou Maïga. Pour le tout nouveau président de FIBA-Afrique, c’est une «sœur» qui s’est éteinte. Des hommages amplement mérités car «Ba-Sali» (Maman) avait dédié toute sa vie au sport, notamment au basketball. Une discipline qu’elle a servie dès sa tendre enfance comme joueuse, puis plus tard comme manager. Elle fut un exemple de renoncement à soi pour la patrie. Et ce ne n’est pas un hasard si elle avait été plébiscitée en 2011 «Meilleur dirigeant sportif» au Mali lors de la «Nuit du Mérite Sportif» du CNOSM.
Cette distinction n’était qu’une juste récompense pour une dirigeante courageuse et clairvoyante qui faisait la fierté du Mali depuis plus d’une décennie à la FIBA (Afrique/Monde). Sa compétence, son intégrité et son efficacité faisaient que de nombreux pays africains enviaient le nôtre d’avoir «une dirigeante dévouée et respectée» de son envergure. «Si le Mali a pu organiser la 23e édition Afrobasket féminin, c’est à cause de l’implication personnelle du président Amadou Toumani Touré. Mais, Tantie Bébé (Salamatou) y a joué aussi un rôle essentiel», a témoigné un cadre du ministre de la jeunesse et des Sports à l’époque.
«Son influence à la FIBA a beaucoup pesé en faveur du Mali dans bien de circonstances. Elle a aussi su mieux conseiller le cabinet tout en maintenant la pression sur ses collaborateurs. Elle n’a pas donc hésité à monter à la première ligne pour débloquer des situations qui paraissaient compromises», avait-il précisé. Avant lui, un expert de FIBA-Afrique venu inspecter les chantiers de l’Afrobasket féminin nous avait dit ceci : «Le Mali a la chance d’avoir des dirigeants sportifs comme Habib Sissoko, Hamane Niang et Salamatou Maïga. Cette dernière est surtout une légende vivante du basket au Mali et en Afrique. Elle a dignement servi cette discipline en tant que joueuse et continue de la servir loyalement comme cadre intègre et compétente».
Il avait poursuivi, «courtoise, disponible, elle est très rigoureuse dans tout ce qu’elle fait. C’est pourquoi elle est très respectée et écoutée dans les instances dirigeantes du basket africain et mondial. On peu la détester parce qu’elle n’a pas froid aux yeux ou parce que son franc-parler dérange beaucoup de gens. Mais, aujourd’hui, difficile de maîtriser la gestion du basket mieux qu’elle» !
Une référence pour des générations. A cette dame, on pouvait tout reprocher sauf qu’elle n’aimait pas le sport, notamment le basket, et qu’elle n’a pas la compétence de le servir au mieux des intérêts du Mali et de l’Afrique. Elle a consacré toute sa vie au sport. D’abord en tant que joueuse ambitieuse et courageuse. Et ensuite en tant que dirigeante à la volonté de réussir inébranlable. Une vraie amazone qui a superbement réussi à s’imposer dans cette jungle du sport où même les hommes ont du mal à imposer leurs qualités et leurs compétences à cause des rivalités stériles et des complots.
Chargée de Mission, puis conseiller technique chargée des infrastructures jusqu’à ce sombre 23 décembre 2014, Salamatou a été secrétaire général de la Fédération malienne de basketball (FMBB) de 1999 à 2014. Elle a également occupé des responsabilités au CNOSM, notamment trésorière générale. «C’est en 1998 à Dakar que j’ai été intégrée par élection, le bureau Central de FIBA-Afrique», se rappelait-elle en souhaitant qu’il y ait plus de places pour les femmes dans les instances sportives africaines et mondiales. «Ce fut un tournant décisif, car en cette même année, la FIBA a décidé d’ouvrir ses portes aux femmes. J’ai donc postulé de même que ma consœur Sallouha Ben Saïd de la Tunisie. C’est pour moi une grande fierté de servir ces deux grandes organisations du basketball», avait-elle ajouté. Elle s’éclipse des parquets de basket après 16 ans à FIBA-Afrique (elle s’occupait désormais des questions juridiques) et 12 ans à FIBA-monde. On comprend alors aisément que, lors du dernier congrès mondial à Séville (Espagne), un vibrant hommage lui ait été rendu pour service rendu au basket-ball.
Orphelines d’une icône. Salamatou Maïga était donc une véritable icône de la balle au panier. Avant le CNOSM, et FIBA, c’est la nation malienne qui avait été la première à lui reconnaître son mérite en l’élevant en 2009 au grade de chevalier de l’ordre national du mérite. Ce sombre mardi 23 décembre 2014, elle rejoint son amie, sa sœur et coéquipière Maïga Aminata Fofana dite «La Panthère» arrachée à notre affection le 3 octobre 2008 et à la mémoire de laquelle elle organisait chaque année un tournoi de basket en partenariat avec la maison des jeunes de Bamako.
En plus des Hamchétou Maïga Bâ, Kaba Awa Maïga et Aïssata Boubacar Maïga dite «Ma Jolie», c’est toute une génération de joueuses championnes d’Afrique 2007 à Dakar (Sénégal) qui se retrouve orpheline de leur tendre et généreuse «Tantie Bébé». «Une femme battante et exemplaire. Tantié Bébé, tu es partie, mais tu resteras à jamais dans nos cœurs», promet Awa Diallo, l’une des nouvelles perles de l’équipe nationale féminine senior du Mali. «Les mots me manquent pour définir cette maman. Elle était la mère de tous les basketteurs et basketteuses du Mali. Elle était une dirigeante exemplaire, une référence pour nous les joueuses», renchérit Meiya Tirera Bamba, capitaine de la sélection nationale féminine senior à l’Afrobasket «Maputo 2013» (Mozambique).
Des joueuses de générations différentes qui se reconnaissaient dans les valeurs défendues par cette Grande Dame qui n’a jamais accepté de les sevrer de la chaleur maternelle. Hélas, la mort s’en est chargée sans vaincre Salamatou Maïga. Un nom désormais marqué à jamais en lettres d’or dans les annales du basketball !
Moussa Bolly
Adieu Tantie Bébé
C’est avec une immense tristesse que nous avons appris le décès de notre Tante et collègue, Mme Salamatou Maïga dite Bébé dans la matinée du 23 décembre 2014. Décès survenu à Paris (France) à l’âge de 62 ans dès suite d’une longue maladie. Celle que nous appelions tous affectueusement «Tantie Bébé», a écrit les plus belles pages du basket malien et africain en tant que joueuse et en tant que dirigeante.
Longtemps Secrétaire général de la Fédération malienne de basket-ball (FMBB), elle était membre de FIBA (Afrique/Monde). Elle a aussi longtemps siégé au CNOSM, notamment comme Trésorière générale. Nommée au Ministère des Sports depuis 2007, «Ba-Sali» a été Chargée de Mission, puis Conseillère Technique chargée des infrastructures jusqu’à son décès. Son expérience et son expertise vont beaucoup manquer à ce Département.
J’ai connu Salamatou vers la fin des années 90 au Comité national olympique et sportif du Mali (CNOSM) à travers Habib Sissoko qui en est élu président en mars 2000. De la méfiance au départ, nos relations ont progressivement évolué vers le respect mutuel, puis la confiance et la complicité quand nous avions été tous les deux appelés en octobre 2007 dans le cabinet de Hamane Niang, alors ministre de la jeunesse et des Sports et aujourd’hui président de FIBA-Afrique et 1er vice-président de FIBA. Si elle était une mère pour moi, elle m’a toujours témoigné le respect dû au collègue, même si souvent je l’obligeais à me tirer les oreilles (rappeler à l’ordre) pour ne pas «dérailler».
Malgré sa brillante carrière et son immense expérience, «Sali» me consultait sur beaucoup de dossiers. Et vice versa. Son avis comptait beaucoup pour votre modeste serviteur, son «attaché» avec Alpha Bagayogo dit Jackson. Elle disait de même de moi. Même quand, j’ai été débarqué du cabinet, nous avons continué à échanger, même si c’était beaucoup plus par mail que dans son bureau où le doux parfum de l’encens vous accueillait toujours au point qu’on n’était pas souvent pressé de la quitter. Même si elle était très éprouvée par la maladie ces dernières années, elle n’a jamais renoncé à sa battre. N’empêche que la sagesse et la lassitude étaient aussi manifestes dans son discours.
Mme Salamatou Maïga et Moussa Bolly à Nice en 2013
Ainsi, quand des proches et des acteurs de la balle au panier la poussaient à briguer la présidence de la Fédération malienne de basket-ball cette année, elle est venue un jour dans mon bureau pour demander mon avis comme c’était souvent le cas. «Je serais bientôt à la retraite et nous ne sommes pas éternels. Je pense qu’il faut passer la main aux jeunes et les aider à maintenir le cap amorcé depuis 1999», fut sa conclusion après une demi-heure d’échanges. Sans doute le dernier débat que nous avons eu en tête-à-tête, elle et moi, parce que peu de temps après, j’ai quitte mes fonctions de chargé de communication du Département.
Réputée pour son franc-parler, Tantie Bébé nous a personnellement laissé des souvenirs agréables en tant que collègue au ministère de la Jeunesse et des Sports. Avec elle, nous formions le cercle qualifié de «Révolutionnaires» parce que nous n’avions pas nos «langues dans la poche» ! Repose en paix dans la grâce éternelle d’Allah, Tantie Bébé ! Amen !
Moussa Bolly