Perspectives difficiles pour les pays en développement en 2015
La baisse des prix du pétrole a accentué le fléchissement de l’activité économique de certains pays en développement.
Selon la Banque mondiale, la hausse imminente des taux d’intérêt américains pourrait ralentir les mouvements de capitaux et relancer l’instabilité sur les marchés financiers des pays en développement.
Les pays en développement sont confrontés à de redoutables défis en 2015,notamment la menace d’une hausse des charges d’emprunt, alors même qu’ils s’adaptent à un nouvel environnement, caractérisé par le faible niveau des prix du pétrole et d’autres produits de base essentiels, qui se traduit par une croissance économique décevante pour la quatrième année consécutive : telles sont les conclusions de la dernière édition des Perspectives économiques mondiales que le Groupe de la Banque mondiale a publié le 10 juin.
Dans la région Asie de l’Est et Pacifique, on s’attend à ce que la croissance se ralentisse pour s’établir à 6,7 % en 2015 et qu’elle se stabilise durant les deux prochaines années en raison d’un ralentissement économique persistant en Chine, compensé par une modeste reprise dans le reste de la région. Importatrice nette de pétrole, la région devrait tirer parti de la baisse des prix des carburants, bien que des pays exportateurs de produits de base tels que l’Indonésie et la Malaisie pâtissent de la faiblesse des cours mondiaux du pétrole, du gaz, du charbon, de l’huile de palme et du caoutchouc.
En Chine, le taux de croissance est en passe de descendre à 7,1 % cette année. Si l’on exclut ce pays, la croissance régionale devrait atteindre 4,9 % cette année, puis 5,4 % en 2016 grâce au renforcement de la demande extérieure — et en dépit du ralentissement de la croissance chinoise —, à une plus grande visibilité en matière d’action publique en Thaïlande et à l’atténuation des pressions intérieures dans d’autres pays.
En Europe et Asie centrale, la croissance devrait faiblir davantage pour passer à 1,8 % en 2015, car la chute des prix du pétrole, les tensions géopolitiques et les répercussions connexes, provenant notamment de Russie, ne sont que partiellement compensées par la modeste reprise de la zone euro.
En Russie, une correction de 2,7 % cette année devrait être suivie en 2016 par une modeste reprise, soutenue par la mise en oeuvre de politiques visant à adapter l’activité économique à un environnement caractérisé par la faiblesse des cours pétroliers. En Turquie, on s’attend que la croissance atteigne 3 % en 2015, les dépenses privées devant se raffermir après les élections de juin. Dans l’hypothèse d’une légère hausse des prix pétroliers en 2016-2017, de l’absence d’une détérioration supplémentaire de la situation géopolitique et de la poursuite de l’application de politiques de stabilisation macroéconomique dans les grandes économies, l’économie régionale devrait se raffermir pour atteindre 3,5 % 2016-2017.
En Amérique latine et dans les Caraïbes, la croissance descendra à 0,4 % en 2015 en raison des difficultés économiques intérieures auxquelles l’Amérique du Sud est confrontée : les sécheresses de grande ampleur, le manque de confiance des investisseurs et la faiblesse des prix des matières premières.
Au Brésil, l’effondrement des investissements et de la confiance des entreprises — dû en partie aux enquêtes sur la compagnie pétrolière Petrobras — se traduira cette année par une contraction de 1,3 % de l’économie. Au Mexique, le climat économique reste fragile ; certes, l’activité reprend, mais plus lentement que prévu en raison de la baisse des prix du pétrole, des résultats décevants du premier trimestre aux États-Unis et de la faible progression des salaires. Durant la période 2016-2017, la croissance de la région devrait s’accélérer pour atteindre 2,4 % en moyenne, car l’Amérique du Sud sortira de la récession et la vigoureuse croissance des États-Unis stimulera l’activité en Amérique du Nord, en Amérique centrale et aux Caraïbes.
Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, le taux de croissance devrait rester inchangé à 2,2 % en 2015. La chute des cours pétroliers pose un problème particulier aux pays exportateurs de pétrole dont la plupart sont confrontés aussi à de sérieux problèmes de sécurité (Iraq, Libye et Yémen) ou disposent d’une capacité d’amortissement économique limitée (Iran, Iraq). Dans le cas des pays importateurs de pétrole, les effets positifs potentiels de la baisse du pétrole sont partiellement annulés par les effets de contagion provenant des pays fragiles de la région, notamment sous la forme de problèmes de sécurité et d’une diminution des envois de fonds. Des entraves structurelles chroniques font obstacle en permanence à une accélération de la croissance dans la région, qui devrait toutefois rebondir pour atteindre 3,7 % durant la période 2016-2017 grâce à l’accroissement de la demande extérieure et au renforcement de la confiance qui stimule l’investissement dans certains pays importateurs de pétrole (Égypte, Jordanie).
En Asie du Sud, la croissance devrait continuer de se raffermir pour atteindre 7,1 % cette année à la faveur de la reprise en cours en Inde et grâce au renforcement progressif de la demande dans les pays à revenu élevé. La baisse des prix pétroliers mondiaux a été très bénéfique à la région : elle a facilité l’assainissement des comptes budgétaires et courants et a permis une réforme des politiques de subvention dans certains pays ainsi que l’assouplissement des politiques monétaires.
En Inde, les réformes récemment mises en oeuvre, qui ont pour effet d’améliorer la confiance des entreprises et des investisseurs et d’accroître les entrées de capitaux, devraient contribuer à porter le taux de croissance à 7,5 % cette année. Au Pakistan, les envois de fonds devraient rester soutenus et la reprise devrait se poursuivre dans les secteurs des services et de l’industrie manufacturière. Pour autant, la croissance restera sans doute modeste du fait de contraintes chroniques en matière d’énergie.
En Afrique subsaharienne, la baisse des cours pétroliers a considérablement réduit la croissance des pays exportateurs de produits de base (Angola, Nigéria) et a ralenti aussi l’activité des secteurs non pétroliers. L’Afrique du Sud devrait être l’un des principaux bénéficiaires de la baisse des prix du pétrole, mais sa croissance est freinée par les pénuries d’énergie, par le manque de confiance des investisseurs dû aux incertitudes qui entourent l’action publique et par la probabilité d’un resserrement progressif des politiques monétaire et budgétaire. Selon les prévisions, la croissance de la région ralentira pour descendre à 4,2 %, rythme plus faible que prévu, principalement en raison de la réévaluation des perspectives au Nigéria et en Angola à la suite de la chute brutale des cours pétroliers, mais aussi en Afrique du Sud du fait des problèmes d’approvisionnement en électricité que le pays connaît en permanence. En 2016-2017, le taux de croissance ne devrait être que légèrement supérieur, car ces difficultés annuleront en partie les effets de la hausse de la croissance des partenaires commerciaux et la poursuite de l’expansion des pays à faible revenu de la région.
Source : Banque Mondiale