Après la signature de l’accord, le long chemin vers la paix au Mali
Après des mois de négociations, le dernier mouvement de la rébellion touarègue du nord du Mali a signé, samedi 20 juin, à Bamako, un accord de paix. Saluée par la communauté internationale, cette avancée doit maintenant être confirmée sur le terrain.
Cette fois-ci, tout le monde veut y croire. La paix dans le nord du Mali est enfin signée par tous les partenaires et les acteurs de la crise, ouverte en janvier 2012 par les indépendantistes touaregs. Après des mois de négociations, d’avancées et de reculades, de manipulations et de pressions, l’accord de paix entériné le 15 mai par Bamako et une partie des communautés du nord du Mali a été paraphé, samedi 20 juin, par le dernier mouvement rebelle touareg qui s’y opposait : la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA), une coalition réunissant divers mouvements, dont le Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA), un groupe armé luttant pour l’indépendance de la région qu’elle a renommée « Azawad ».
Négocié en Algérie, cet accord est censé restaurer l’autorité de Bamako dans le nord du pays, en premier lieu à Kidal d’où les autorités maliennes ont été chassées en 2012 par le MNLA. Ce texte prévoit une large décentralisation, à travers la constitution d’assemblées régionales dotées de pouvoirs importants, élues au suffrage universel direct. Il reconnaît également à « l’Azawad » une réalité humaine sans contenu politique.
Jusqu’au 20 juin, la CMA souhaitait que l’on ajoute une « reconnaissance officielle de l’Azawad comme une entité géographique, politique et juridique », la création d’une assemblée interrégionale couvrant toute la zone, et un quota de « 80 % de ressortissants de l’Azawad » dans les forces de sécurité de la région. En d’autres termes, la CMA cherchait à obtenir, à défaut de l’indépendance, une forme d’autonomie pour l’Azawad.
Communauté internationale. En signant cet accord, il semble qu’elle y ait renoncé. Pourquoi ? « La communauté internationale nous a tordu le bras pour signer ce texte, elle nous a donné des garanties sur des points de blocage : l’intégration dans l’armée malienne de nos hommes, la future négociation du statut de l’Azawad », explique Attaye Ag Mohamed, membre de la délégation de la CMA, présent samedi à Bamako. Dernier signe de cette pression internationale, la tribune publiée dans la presse, vendred 19 juin, par le ministre français des affaires étrangères, Laurent Fabius, et son homologue néerlandais (et ancien chef de la force onusienne au Mali, Minusma), Bert Koenders.
Aussitôt la paix signée samedi, la communauté internationale a exprimé sa satisfaction. À commencer par l’Algérie, chef de file de la médiation internationale. C’est « un nouveau départ, une nouvelle opportunité et une nouvelle destinée pour cette grande nation malienne », a déclaré le ministre algérien des affaires étrangères, Ramtane Lamamra.
Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a lui aussi félicité les signataires et leur a adressé ce message : « La paix au Mali demeure la responsabilité du Mali et des Maliens, et le secrétaire général exhorte toutes les parties à continuer à œuvrer de bonne foi afin de progresser dans cette direction et à appliquer intégralement les dispositions du cessez-le-feu ».
La France a également salué cet accord. Le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, invité sur Europe 1 dimanche matin, a même jugé qu’il s’agissait d’« un accord historique », qui va mettre fin à des décennies de conflits entre les peuples du Nord et du Sud.
« Dès qu’il y avait des tensions, voire des violences, cela favorisait la percée des djihadistes », a-t-il rappelé, alors que la France est engagée au Mali depuis janvier 2013 pour lutter contre les islamistes du Sahel. Et d’estimer, triomphant : « D’une certaine manière, on a gagné la guerre début 2013 (avec l’opération française Serval, NDLR) et on vient de gagner la paix. » Malheureusement, sur le terrain, rien n’est moins sûr. Une partie des Touaregs de la CMA a déjà annoncé qu’elle se désolidarisait des signataires de l’accord d’Alger. Pour eux, le combat continue. Et avec lui, l’instabilité dans le nord du pays.