Les Nations Unies réclament la fin de l’impunité au Mali
Le représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies au Mali, Mongi Hamdi, reçu par le chérif de Nioro du Sahel.
Un rapport des Nations Unies publié vendredi réclame la fin de l’impunité pour les nombreuses violations graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises entre novembre 2013 et mai 2014 au Mali.
Ce premier rapport conjoint publié par la Mission Multidimensionnelle Intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation au Mali (Minusma) et le Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) documente des violations et abus commis par les diverses parties au conflit. Parmi celles-ci figurent des exécutions sommaires et extrajudiciaires, des arrestations et détentions arbitraires et illégales, des cas de torture, l’utilisation et l’enrôlement d’enfants par les groupes armés ainsi que des pillages et destructions de biens.
Le rapport est le résultat de 36 missions d’enquêtes et d’établissement des faits menées par les équipes des droits de l’homme de la Minusma dans plusieurs localités des régions de Kidal, Gao, Tombouctou et Mopti. L’équipe d’enquête a notamment visité plus de 150 lieux de détention dans ces quatre régions, ainsi que dans les localités de Sélingué (140 km de Bamako), Dioila (200 km de Bamako) et Markala, dans la région de Ségou.
Le rapport met en évidence les violations commises par les Forces Armées Maliennes (FAMa) sur des civils, notamment sur la base de soupçons d’appartenance ou de collaboration avec les groupes armés. Il cite notamment des cas d’exécutions sommaires, de tortures, des traitements cruels, inhumains ou dégradants, des viols, des enlèvements, des arrestations et détentions arbitraires. Ces violations ont touché tout particulièrement Kidal, où les violations enregistrées ont été les plus nombreuses, mais aussi Anefis, Tarssek, Aguelhok et la région de Gao.
Selon les statistiques de la Division des droits de l’homme, 150 arrestations arbitraires ont été effectuées par les FAMa entre le 1er novembre et le 31 mai 2014, touchant plus particulièrement des personnes d’origine touareg (52%), arabe (20%) et songhaï (10%).
Le rapport documente également les abus des droits de l’homme et du droit international humanitaire commis par les groupes armés. Parmi ces violations figurent des cas d’exécutions sommaires, de tortures et traitements cruels, inhumains ou dégradants, l’administration de la justice de fait dans le nord du pays ainsi que l’utilisation et l’enrôlement d’enfants dans les groupes armés.
Le rapport révèle que des attaques indiscriminées ou asymétriques ainsi que des actes criminels et terroristes ont été commis par divers groupes armés. Dans les régions du nord, les groupes extrémistes, parmi lesquels Ansar Dine, Aqmi et Mujao, ont ciblé des civils ainsi que les forces nationales et internationales, y compris le personnel des Nations Unies.
Les évènements de Kidal du 16, 17 et 21 mai 2014 ont également entrainé des exactions graves et feront l’objet d’un rapport spécial séparé qui sera publié à une date ultérieure.
Le conflit au nord du Mali a relancé la question de l’impunité dont jouissent les responsables des groupes armés, y compris extrémistes, quant aux crimes graves commis à l’encontre de soldats maliens et de la population civile au moment de la prise de casernes militaires en 2012.
« Il est nécessaire que les violations et abus graves des droits de l’homme et du droit humanitaire commis au Mali fassent l’objet d’une enquête approfondie et impartiale, à la fois dans l’intérêt des victimes et pour la réconciliation au Mali », a déclaré le représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies au Mali, M. Mongi Hamdi
« L’ONU continuera d’apporter toute l’assistance nécessaire aux autorités maliennes pour assurer que la promotion et la protection des droits de l’homme soient renforcées. Nous sommes convaincus que la finalisation du paraphe et la signature de l’Accord de Paix et de Réconciliation Nationale issue des pourparlers inter-maliens et sa mise en œuvre contribueront grandement à réaliser cet objectif », a souligné M.Hamdi.
« Les individus impliqués dans des violations des droits de l’homme documentées dans ce rapport conjoint doivent être tenus responsables de leurs actes. L’impunité dont ils jouissent est inacceptable et doit cesser », a ajouté le Haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Zeid Ra’ad Al Hussein. « Cela permettra de créer un environnement propice au dialogue dans la perspective d’un retour à une paix durable », a-t-il poursuivi.
Dans leur rapport, la Minusma et le HCDH formulent 19 recommandations à l’intention du Gouvernement malien, des groupes armés et de la communauté internationale. Ces recommandations portent notamment sur l’amélioration des conditions sécuritaires, sur un plein engagement dans le processus de négociation politique, sur la lutte contre l’impunité, sur l’amélioration des conditions de détention et sur la célérité de l’administration de la justice. Ces recommandations visent ainsi à soutenir le Mali dans son engagement vers une résolution pacifique du conflit dans le plein respect des droits de l’homme.
Télécharger ici le Rapport_Mali 1er Nov 2013_31 mai 2014