Guerre d’Ukraine : l’armée russe étale ses limites
Le pouvoir du président Poutine pourra-t-il survivre à la guerre qu’il a déclenchée en Ukraine?
L’armée russe est-elle un » tigre en papier » ? Entrée en Ukraine le 24 février dernier, elle n’a toujours pas le contrôle de la situation après plus de 20 jours de combats. L’enlisement progressif des opérations montre bien qu’on a surestimé la puissance de feu de l’Armée de Vladimir Poutine.
Quand on lit les commentaires des experts militaires sur le déroulé des opérations, beaucoup s’étonnent que plus de vingt jours après le déclenchement de l’offensive, les Russes ne soient pas parvenus à mettre hors d’action les défenses anti-aériennes ukrainiennes. Or c’est un préalable dans un conflit majeur comme celui-ci. Le soutien aérien doit permettre la célérité et la consolidation des opérations au sol. Sans ce soutien, la progression des troupes, notamment des blindés, est plus lente, plus périlleuse, plus aléatoire. L’aviation russe a été assez » décevante « , au regard de sa taille jugent les experts.
Une seule explication s’impose, elle n’a pas les capacités d’enchaîner les opérations complexes. Sa capacité d’appui aux troupes au sol dans leur progression, a été surestimée. Pour être plus clair, l’aviation russe est incapable de se coordonner, de se synchroniser avec les blindés et l’infanterie, pour constituer ce que appelle dans le jargon militaire un « poing d’acier « , c’est à dire une avancée irrésistible des troupes grâce au soutien aérien, pour percer le front et atteindre l’objectif visé, ou encercler l’ennemi. Après deux semaines, les Russes procèdent par des bombardements au canon, » à l’aveugle » disent les spécialistes. Ce travail est en principe dévolu à l’aviation, preuve que leur aviation a bien atteint ses limites dans le conflit.
L’offensive elle-même fut lancée le 24 février à l’aube. Dans les guerres modernes, les offensives se déclenchent toujours la nuit afin de rendre maximal l’effet de surprise sur l’ennemi. Le fait de l’avoir déclenchée à l’aube traduit une certaine frilosité des Russes, comme s’ils leur fallait la lumière du jour pour avancer. On en déduit que la reconnaissance des cibles n’ a pas été correctement effectuée. Cela explique aussi le fait que bon nombre de colonnes de chars ont perdu leur chemin et ont été capturées par les ukrainiens. Cette situation résulte des lacunes du renseignement militaire russe. On a aussi vu des colonnes de chars abandonnés faute de carburant, des soldats pillant des boutiques pour emporter de la nourriture. Les déficiences de la logistique des Russes sont apparues au grand jour.
Il faut se souvenir que l’Ukraine a été envahie par sa frontière avec la Biélorussie. Or les Russes avaient prétexté des » manœuvres conjointes » avec l’armée biélorusse pour masser chars, infanterie et 30 000 soldats à cette frontière. Ainsi beaucoup de soldats russes capturés ont affirmé qu’ils n’étaient pas là pour faire la guerre , mais des manœuvres. Fidèle à sa tradition soviétique, l’État major russe n’a pas daigné dire aux soldats qu’ils montaient bien au combat. C’est devant le feu adverse qu’ils ont réalisé qu’ils étaient au cœur d’un conflit. Psychologiquement, beaucoup n’y étaient pas préparés. Ce fut un choc. Le moral des troupes est un élément déterminant dans tout conflit.
Dans un entretien avec le Président Macron, rapporté par la presse, au cinquième jour du conflit, le Président Vladimir Poutine a précisé que les opérations se déroulaient selon le plan établi. Il a ajouté que les forces spéciales allaient désormais intervenir. En fait, le plan initial russe a lamentablement échoué. Il prévoyait de prendre rapidement la capitale Kiev, de faire chuter le gouvernement et de poursuivre ainsi l’offensive face à des forces sans commandement au sommet, qui capituleraient plus facilement. Il faut dire qu’en 2014, la Russie a annexé la Crimée, sans réaction de l’armée ukrainienne. Elle a aussi » fabriqué » deux rébellions à l’Est, que l’Ukraine peine à combattre. Ainsi l’Etat major russe ne s’attendait pas à une résistance de l’Ukraine au-delà de trois jours.
Après trois semaines, l’offensive russe n’a pas encore porté de fruits, et on dit Vladimir Poutine en colère et irrité. Les forces spéciales dont il fait mention sont déjà intervenues, notamment dans la bataille pour l’aéroport d’Hostomel à 30 km de Kiev. Elles ont été aéroportées dans l’aéroport qu’il s’agissait de sécuriser dans le but d’en faire une tête de pont pour l’acheminement du matériel dans l’offensive sur Kiev. Les forces ukrainiennes ont repris cet aéroport aux Russes, rendant impossible une offensive immédiate sur Kiev. La ville de Kharkiv, la seconde d’Ukraine avait aussi été prise par les Russes, les Ukrainiens l’ont reconquise. L’offensive russe telle que prévue a été enrayée. Certes les Russes ont repris leur marche en avant. Mais elle est plus difficile, et aux prix de lourdes pertes, environ 151 chars perdus, 300 véhicules blindés, 10 avions de chasse, 11 hélicoptères, et entre 2000 et 4000 soldats, selon une décompte établi le 8 mars soit entre 153 et 307 morts par jour. Avec le ratio de trois blessés pour un mort annoncé par Moscou, l’armée russe compterait entre 6 000 et 12 000 blessés. On ne voit pas comment les Russes pourront facilement l’emporter. La guerre va s’enliser, et les sanctions économiques vont la rendre coûteuse pour le pays.
Le rouble a perdu quelque 40% de sa valeur face au dollar, les firmes, occidentales les unes après les autres quittent la Russie, les américains et les Canadiens ont décrété un embargo sur le pétrole et le gaz russe, les ports occidentaux sont fermés aux navires russes, les aéroports aux compagnies aériennes russes, les banques commerciales ainsi que la banque centrale de Russie n’ont plus accès à leurs comptes en dollar et en euros, etc…etc….il sera difficile à Russie de se tirer de cette situation. Pour beaucoup de spécialistes, même si elle l’emporte en Ukraine, le pays ne sera pas pour autant pacifié, car il y aura une guérilla, et la Russie va continuer à perdre des hommes, des avions et des chars.
L’arme nucléaire n’est pas une arme opérationnelle. C’est une arme de dissuasion destinée à « faire peur ». Elle n’ a pas vocation à être employée. Ainsi elle n’a aucune utilité dans le conflit actuel. En tant que dictateur, le président Poutine est entouré de personnes qui approuvent toutes ses initiatives. Il n’est pas sûr aujourd’hui que son pouvoir sorte indemne de cette crise. Pour beaucoup, son avenir en tant que Président de la Russie se joue aujourd’hui en Ukraine.
Enfin, l’Allemagne a décidé de » se réarmer « . Si le monde a changé, notre politique doit aussi changer disait le Chancelier Olaf Scholz devant le Bundestag le 27 février, soit 03 jours après l’invasion de l’Ukraine. Ainsi 100 milliards d’euros additionnels seront dégagés dans ce sens dès cette année. Le budget de la défense va progressivement monter en puissance dans les trois prochaines années. Ce n’est pas vraiment une bonne nouvelle pour le monde. A la fin de la seconde guerre mondiale, d’importants territoires ont été enlevés à l’Allemagne. Aujourd’hui il y a un fort courant de la société allemande qui réclame la « restitution » de ces territoires. Ils se font appeler » les citoyens du Reich « . Si l’Allemagne se met en idée de récupérer ses territoires, humm… humm…
Douglas Mountain
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