Guinée : 2 morts dans des violences électorales à Conakry
Alpha Condé, le président sortant, candidat pour un deuxième mandat.
Deux personnes ont péri jeudi à Conakry dans des violences entre partisans du président guinéen Alpha Condé et de son principal opposant Cellou Dalein Diallo, a appris l’AFP de sources sécuritaires, des affrontements qui se sont poursuivis vendredi, dernier jour de la campagne présidentielle. La circulation a été paralysée pendant une grande partie de la journée sur les principaux axes de la capitale en raison de ces violences, à l’initiative des deux camps, avec de nombreux actes de vandalisme, selon des témoins et des journalistes de l’AFP.
J’ai fait plusieurs quartiers de Conakry depuis ce matin, et j’avoue que ce que j’ai vu est extrêmement grave, a déclaré à l’AFP le ministre des Droits de l’Homme Kalifa Gassama Diaby, indiquant avoir réclamé un déploiement supplémentaire des forces de l’ordre.
Le cortège du Premier ministre Mohamed Saïd Saïd Fofana, qui voulait se rendre au domicile du chef de l’opposition, dans le quartier de Dixinn, a été obligé de rebrousser chemin à cause des jets de pierres entre groupes rivaux, selon une source policière.
Le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest, Mohamed Ibn Chambas, M. Diaby, ainsi que l’ambassadeur américain, ont rendu visite à Cellou Dalein Diallo pour discuter des moyens de rétablir le calme, a-t-on appris dans l’entourage de ce dernier.
Le président Condé s’est rendu vendredi matin au marché de Madina, le plus grand du pays, où des jeunes vendeurs de pièces détachées malinkés, son ethnie d’origine, ont vu leurs conteneurs incendiés jeudi lors du passage du cortège de M. Diallo, appelant à ne pas céder aux provocations, a constaté le photographe de l’AFP. Il a annoncé à cette occasion l’annulation de son dernier meeting de campagne prévu dans l’après-midi et appelé chacun à se préparer à aller voter dimanche.
Dans la nuit de jeudi à vendredi, une vingtaine de boutiques appartenant à des commerçants peuls, l’ethnie à laquelle appartient le chef de l’opposition, ont été pillées par les partisans d’Alpha Condé en représailles à l’incendie de ces conteneurs, selon une source policière. D’autres échoppes ont été brûlées dans la matinée, selon le photographe de l’AFP.
– Scènes de pillage – Lors de la couverture du déplacement de M. Condé, les photographes de l’AFP et de Reuters, Cellou Binani Diallo et Luc Gnago, se sont vu confisquer sans explication leurs appareils par la garde présidentielle. Les deux photographes ont pu les récupérer au palais présidentiel environ une heure plus tard, et ont constaté que les images avaient été examinées avant restitution, a indiqué Cellou Binani Diallo.
Des heurts ont éclaté jeudi après-midi au passage dans ce secteur du défilé des partisans de Cellou Dalein Diallo, de retour à Conakry après trois semaines de campagne électorale dans l’intérieur du pays. J’ai appris qu’il y a un mort par accident de moto dans la foule surexcitée et un par bastonnade lors d’accrochages entre militants de l’UFDG et du RPG (partis respectifs de MM. Diallo et Condé, NDLR) non loin du marché de Madina, a déclaré à l’AFP le général Ibrahima Baldé, chef d’état-major de la gendarmerie.
Une autre source sécuritaire a affirmé à l’AFP sous couvert d’anonymat qu’il y a eu entre deux et trois morts, précisant avoir vu personnellement deux corps et avoir été informée de la découverte d’un troisième, apparemment battu à mort, sous un pont. Le ministre de l’Intérieur Mahmoud Cissé a de son côté avancé un bilan d’un mort et vingt blessés jeudi. Le ministre a appelé à la retenue, prévenant qu’aucun trouble à l’ordre public ne sera toléré.
D’autres heurts se sont produits vendredi dans les quartiers de Matoto et d’Enta, où des partisans présumés du pouvoir ont saccagé plus d’une dizaine de boutiques appartenant à des Peuls, selon des témoins.
Un cadre de banque, Abdoulaye Camara, a affirmé à l’AFP avoir vu des jeunes tous vêtus de tee-shirts jaunes (couleur du parti au pouvoir) accompagnés de loubards armés de bâtons casser des magasins et des boutiques en présence de policiers qui n’ont rien fait pour les dissuader.
La campagne du chef de l’Etat s’est fixé l’objectif ambitieux, sous le slogan un coup KO, de le faire réélire dès le premier tour, prévu dimanche. Ses adversaires l’accusent de vouloir emporter la victoire grâce à des fraudes à grande échelle, ce que le camp présidentiel dément, arguant de commentaires positifs de la communauté internationale sur le processus électoral en Guinée.
AFP