Infertilité : dans deux siècles, l’espèce humaine pourrait disparaître, selon un médecin biologiste
Dans un entretien accordé au Point, le chef du service biologie de la reproduction au CHU de Montpellier, Samir Hamamah, tire la sonnette d’alarme. Face au taux de fécondité en déclin, le spécialiste perçoit une grande menace pour l’humanité.
En 2022, plus que jamais, l’infertilité sort de l’ombre et émerge dans le débat public. 3,3 millions de personnes seraient touchées en France, indiquait un rapport remis au ministère des Solidarités et de la Santé à la fin du mois de février. Le professeur Samir Hamamah, chef du service biologie de la reproduction au CHU de Montpellier en est le coauteur. Dans une interview publiée mardi 22 mars dans les colonnes du Point , le rapporteur du premier plan national de lutte contre l’infertilité ne cache pas son inquiétude pour le futur de l’humanité.
Une menace pour l’humanité
«Je savais déjà que notre santé reproductive était menacée, mais c’est plus que cela : l’espèce humaine tout entière est en danger de disparition», déplore le professionnel de santé auprès de nos confères. Et d’ajouter : «Les scénarios les plus pessimistes prévoient une extinction de l’espèce dans un siècle et demi. Deux siècles pour les plus optimistes ».
Pour parvenir à cette conclusion, le professeur Samir Hamamah mentionne un taux de fécondité en déclin. Pour faire perdurer une société, ce dernier doit être de 2,6 enfants par famille. Or, «en France, le nombre d’enfants par femme est descendu à 1,83. Au Portugal, en Espagne ou en Italie, il est de 1,3», relève le spécialiste. Et le constat est d’autant plus alarmant pour la Chine qui «pourrait perdre 50% de sa population» dans les 40 à 50 prochaines années, selon Samir Hamamah.
Sperme impacté, désir de grossesse tardif
Si l’infertilité reste inexpliquée dans 10 à 15% des cas, certaines causes ont été mises en lumière pour le reste des concernés. Depuis une trentaine d’années, on observe notamment une baisse inquiétante de la quantité (plus de 50%) et de la qualité des spermatozoïdes. L’âge de la femme, de plus en plus tardif au moment du projet parental, est également pointé du doigt. «Aujourd’hui, une femme de 30 ans a un risque sur quatre de rencontrer des problèmes d’infertilité. À 40 ans, c’est une femme sur deux», souligne le professeur Samir Hamamah.
La piste d’une mauvaise hygiène de vie ne doit pas non plus être écartée. «L’excès de poids, le stress, la consommation de tabac, d’alcool ou de café en excès, ou encore le manque de sommeil : tout cela nuit à la santé reproductive», souligne le médecin.
Prévenir dès le collège
Pour remédier à cette problématique de santé, Samir Hamamah et Salomé Berlioux, présidente de l’association Chemins d’avenir, ont formulé 21 recommandations dans un plan d’action national. Parmi elles, la proposition d’un logo «reprotoxique» sur les produits de la vie courante, destiné à identifier les perturbateurs endocriniens, ces molécules chimiques qui parasitent le système de régulation hormonale. La création d’un institut national de la fertilité, à l’image de celui pour le cancer, est également demandée.
Côté prévention, la préservation de gamètes en banque est fortement recommandée pour les hommes de 29 à 45 ans et les femmes de 29 à 37 ans. Et ce, sans raison médicale, comme le veut le décret d’application de la loi de bioéthique. Toutefois, pour ceux qui souhaiteraient recourir ensuite à la PMA, le spécialiste rappelle qu’il ne s’agit pas «d’une solution miracle à toutes les sortes d’infertilité». «Dans deux cas d’infertilité sur trois, elle est inefficace», résume-t-il.
Selon le professeur, il faudrait agir bien avant la décision du projet parental, en informant les adolescents dès le collège sur leur fertilité et en leur donnant «des clés pour préserver leur santé reproductive.» Ce n’est pas «une politique nataliste, assure-t-il. (…) Il s’agit ni plus ni moins de préserver l’espèce humaine. Nous avons une responsabilité collective.»
Tiphaine Honnet
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