La nation reconnaissante à la grande amazone que fut Salamatou Maïga
L’arrivée de la dépouille mortelle transportée par des éléments du bataillon des sports des Forces Armées.
La grande famille du sport malien voire la nation malienne a rendu un dernier hommage à Salamatou Maïga dite Bébé avant de la conduire en sa dernière demeure. C’était au stade du 26 mars de Yirimadio ce mercredi 31 décembre 2014. Justement le jour où elle aurait dû faire prévaloir son droit à la retraite. Ainsi, Tanti Bébé est restée au service du Mali, de l’Afrique et du monde jusqu’à son dernier soupir. C’est donc à juste titre qu’elle été élevée au rang d’officier de l’ordre national du mérite par le président Ibrahim Boubacar Kéita.
Autour de la dépouille de la très regrettée Salamatou Maïga dite Bébé, arrachée à notre affection le 23 décembre 2014 à Paris, de l’émotion, de la tristesse et surtout des larmes. A commencer par celles du président Ibrahim Boubacar Kéita au moment de la décorer officier de l’ordre national du mérite à titre posthume. Cette grande battante, la meilleure référence pour toutes les générations, elle était chevalier de l’ordre national à son décès. Une reconnaissance nationale que le chef de l’Etat a renouvelée en rendant hommage à cette grande dame dans son message du nouvel an 2015.
Des larmes, Hamane Niang n’a pu non plus les retenir en évoquant la mémoire de Bébé. L’actuel président de FIBA-Afrique a côtoyé l’illustre disparue à la Fédération malienne de football (FMBB), au ministère de la jeunesse et des Sports et à FIBA (Afrique et monde). Son témoignage a ému la foule de personnalités politiques (Premiers ministres et membres du gouvernement, anciens ministres, élus, diplomates…) et sportives (FIBA, CNOSM, responsables fédéraux, anciennes gloires…) ainsi que de collaborateurs (cabinets ministériels) d’amis et proches de la famille et admirateurs de ce «monument» du basket-ball malien et africain.
Pour «Vieux Niang», la disparition de Salamatou est une immense perte pour le sport, singulièrement le basket. «Sali laisse à la génération actuelle et aux futures un héritage moral et sportif en tant que joueuse et dirigeante», a ajouté le président de FIBA-Afrique. «Merci pour ton combat et ton amitié. Merci pour tout», a conclu Hamane Niang ébranlé par des larmes rebelles. «Le Mali, le sport malien, le basketball malien, le basketball africain et le basketball mondial ont perdu une citoyenne, un cadre, une sportive, une dirigeante sportive, une maman» ! Telle est la conviction du Ministre Housseini Amion Guindo en parfait accord avec l’assistance.
«Je serais bientôt à la retraite et nous ne sommes pas éternels. Je pense qu’il faut passer la main aux jeunes et les aider à maintenir le cap amorcé depuis 1999», a-t-il poursuivi, paraphrasant ainsi la regrettée Salamatou qui s’exprimait ainsi au renouvellement des bureaux de la Fédération Malienne de Basketball et de FIBA Afrique. Prémonition ? En tout cas, Tanti Bébé avait décidé de laisser la place à ses cadets et enfants.
Une brillante carrière professionnelle et sportive. Née le 13 octobre 1952 à Niamey (Niger), «Ba Sali» a mené une carrière bien remplie. «Elle a servi l’Etat avec dévouement et loyauté jusqu’aux derniers instants de sa vie», précise Poulô dans son oraison funèbre. Ainsi de 1979 à 1980, Bébé a servi à la Direction nationale des sports et de l’éducation physique (DNSEP) comme chargée des fédérations nationales. Après un stage de 5 ans en Pologne, elle revient à la DNSEP comme chef de section du «Sport d’Elite» de 1986 à 2000. Directrice adjointe du stade du 26 mars (De 2001 à 2004), celle que les collègues appellent affectueusement «Tchatcher» a repris ses études à l’Institut national des travailleurs sociaux (2004 à 2007) pour préparer le diplôme d’administrateur de l’action sociale.
De 2007 à 2012, «Tanti B» est nommée chargée de mission au ministère de la jeunesse et des Sports avant d’assumer les responsabilités de conseiller technique au ministère des Sports de 2012 à ce triste 23 décembre 2014. «Sur le plan sportif, Salamatou est sans doute une référence nationale et internationale», a rappelé Housseini Amion Guindo. Capitaine de l’équipe nationale de basketball, Salamatou a joué successivement à l’Africa sport de Gao et au Djoliba AC de Bamako. Et pendant sa riche carrière sportive, elle a été, entre autres, secrétaire générale adjointe de la Fédération malienne de basketball (1991-1999) puis secrétaire générale de la Fédération malienne de basketball (1999-2014), directrice de marketing (1994 à 1999) et trésorière générale du Comité national olympique et sportif du Mali – CNOSM – (1999-2003).
Au niveau des instances africaines et mondiales, notre regrettée «Ba Sali» a été membre du bureau central de FIBA-Afrique et de FIBA-Monde de 1998 à 2014 ; commissaire FIBA de 1998 à 2014. Et depuis 1998, Salamatou était la présidente de l’Association des femmes maliennes pour le sport (Afemas).
Une génération talentueuse sevrée par la mort. «Salamatou était un cadre sérieux, loyal, dévoué, intègre, compétent, disponible et rigoureux dans tout ce qu’elle faisait. Elle avait un franc-parler qui dérange souvent, mais qui a permis de cultiver en elle le profond respect de l’autre», s’est rappelé Poulô. Cette «magnifique» amazone, pour paraphraser le grand chancelier des ordres nationaux, a consacré toute sa vie au sport. «Salamatou est une amazone de notre sport national, de par sa passion et sa pratique du sport. Salamatou était aussi l’ambassadrice du Mali dans son secteur. Un rôle qu’elle a rempli avec succès, humilité et abnégation jusqu’à sa mort», atteste le ministre des Sports. Il rebondit sur une précision de taille, «chaque fois que Salamatou était chef de mission dans des campagnes continentales, le Mali a toujours connu le bonheur et la consécration».
C’est le cas de nos équipes nationales sénior dames en 2007 ; U-19 filles en 2006 ; U-18 filles (1996, 2000, 2006, 2008 et 2014) ; U-16 filles (2009, 2011 et 2013) et, enfin, le Djoliba AC en 2005. Ce n’est donc pas un hasard qu’elle ait été élue en 2011, «meilleur dirigeant sportif» lors de la «nuit du mérite sportif» du CNOSM. En reconnaissance de tous ces services rendus à la nation et au sport aux niveaux national et international, Salamatou a été décorée «chevalier de l’ordre National». En tant que collaborateurs, nous retenons de cette collègue, au franc-parler souvent déroutant, des valeurs de justice, d’intégrité, de loyauté et de conviction, de courage, de persévérance et d’abnégation…
D’une jovialité contagieuse, Salamatou ne pouvait laisser personne indifférente. Nos souvenirs avec Tanti Bébé, nous ne pouvons pas les évoquer tous dans un article de presse tant ils sont nombreux et agréables. Des «réunions café» du cabinet, aux différentes commissions d’organisation d’événements majeurs du Département en passant par les missions effectuées ensemble, dont la dernière fut les jeux de la francophonie «Nice 2013» (France) en septembre 2013. Des souvenirs bien sûr marqués aussi par de tristes moments comme le décès de sa sœur et amie Aminata Fofana dite «La Panthère», Mamadou Coulibaly dit Mad Coulou, Mory Goïta, Mohamed Ould Saleck…
Ce triste 31 décembre 2014, Salamatou a définitivement rejoint son amie, sa sœur et coéquipière Aminata Fofana dite «La Panthère» arrachée à notre affection le 3 octobre 2008 et à la mémoire de laquelle elle organisait chaque année un tournoi de basket en partenariat avec la Maison des Jeunes de Bamako. En plus des Hamchétou Maïga Bâ, Kaba Awa Maïga et Aïssata Boubacar Maïga dite «Ma Jolie», c’est toute une génération de joueuses championnes d’Afrique 2007 à Dakar (Sénégal) qui se retrouve orpheline de leur tendre et généreuse Tanti B. «Une femme battante et exemplaire. Tanti Bébé, tu es partie, mais tu resteras à jamais dans nos cœurs», promet Awa Diallo, l’une des nouvelles perles de l’Equipe nationale féminine senior du Mali.
«Les mots me manquent pour définir cette maman. Elle était la mère de tous les basketteurs et basketteuses du Mali. Elle était une dirigeante exemplaire, une référence pour nous les joueuses», renchérit Meiya Tirera Bamba, capitaine de la sélection nationale féminine senior à l’Afrobasket «Maputo 2013» (Mozambique). Des joueuses de générations différentes qui se reconnaissaient dans les valeurs défendues par cette grande dame qui n’a jamais accepté de les sevrer de la chaleur maternelle. Hélas, la mort s’en est chargée sans vaincre Salamatou Maïga. Un nom désormais marqué à jamais en lettres d’or dans les annales du basketball.
Repose en paix l’inoubliable Tanti Bébé ! Qu’Allah, le Tout Puissant et Très Miséricordieux t’accueille dans la grâce éternelle de son royaume. Amen !
Moussa Bolly