Opposé à la guerre en Ukraine, un diplomate russe fait défection à Genève : « Jamais je n’ai eu autant honte de mon pays »
« Jamais je n’ai eu autant honte de mon pays que le 24 février de cette année », date du lancement, il y a trois mois, de « la guerre d’agression déclenchée par Poutine contre l’Ukraine, et en fait contre l’ensemble du monde occidental ». Boris Bondarev, conseiller à la Mission de Russie auprès des Nations unies à Genève depuis 2019, a annoncé sa démission lundi dans une déclaration partagée avec des diplomates.
« Boris Bondarev est un héros », a déclaré Hillel Neuer, le directeur exécutif de l’organisation non gouvernementale UN Watch, qui a publié la lettre, appelant « tous les autres diplomates russes aux Nations unies – et dans le monde – à suivre son exemple moral et à démissionner ». Cette guerre « n’est pas seulement un crime contre le peuple ukrainien, mais aussi, peut-être, le crime le plus grave commis contre le peuple russe, avec une lettre Z en gras barrant tous les espoirs et perspectives d’une société libre et prospère dans notre pays », peut-on lire dans sa déclaration. « Ceux qui ont conçu cette guerre ne veulent qu’une chose : rester au pouvoir pour toujours, vivre dans des palais pompeux et sans goût, naviguer sur des yachts comparables en tonnage et en coût à toute la marine russe, bénéficier d’un pouvoir illimité et d’une impunité totale. Pour y parvenir, ils sont prêts à sacrifier autant de vies qu’il le faudra. Des milliers de Russes et d’Ukrainiens sont déjà morts rien que pour cela. »
Boris Bondarev, diplomate depuis 2002, charge aussi le ministère qu’il a servi, et qui était devenu sa « maison », sa « famille ». Ces vingt dernières années, « le niveau de mensonges et de manque de professionnalisme dans le travail du ministère des Affaires étrangères n’a cessé d’augmenter ». Il n’est plus que « bellicisme », « mensonges » et « haine ». Le chef de la diplomatie, Sergueï Lavrov, illustre cette « dégradation ». « Intellectuel professionnel et éduqué, que beaucoup de mes collègues tenaient en si haute estime », il est devenu en 18 ans « une personne qui diffuse constamment des déclarations contradictoires et menace le monde (c’est-à-dire la Russie aussi) avec des armes nucléaires ! » Le diplomate russe ne peut « tout simplement plus participer à cette ignominie sanglante, stupide et absolument inutile ».
Le diplomate russe ne peut « tout simplement plus participer à cette ignominie sanglante, stupide et absolument inutile », écrit-il. Y en aurait-il d’autres dans son cas ? Pour Hillel Neuer, « les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Union européenne devraient […] créer un programme pour encourager plus de diplomates russes à faire défection en offrant protection et sécurité financière et un endroit où s’installer avec leur famille ».